Nairobi, 27 mars 2024 - Les ménages de tous les continents ont gaspillé plus d'un milliard de repas par jour en 2022, alors que 783 millions de personnes étaient touchées par la faim et qu'un tiers de l'humanité était confronté à l'insécurité alimentaire. Le gaspillage alimentaire continue à nuire à l'économie mondiale et à alimenter le changement climatique et la pollution ainsi que la dégradation de la nature. Telles sont les principales conclusions d'un rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) publié aujourd'hui, à l'approche de la Journée internationale du zéro déchet.
Le rapport 2024 sur l'indice de gaspillage alimentaire du PNUE, rédigé par WRAP, fournit l'estimation mondiale la plus précise du gaspillage alimentaire à l’échelle des détaillants et des consommateurs. La publication offre des conseils aux pays pour améliorer la collecte de données et présente des bonnes pratiques afin de parvenir à la réduction effective du gaspillage alimentaire après l’avoir évaluée.
En 2022, 1,05 milliard de tonnes de déchets alimentaires ont été produits (y compris les parties non comestibles), soit 132 kilogrammes par habitant et près d'un cinquième de tous les aliments disponibles pour les consommateurs. 60 % des aliments gaspillés en 2022 l'ont été au niveau des ménages. Les services de restauration sont quant à eux responsables de 28 % du gaspillage et le commerce de détail de 12 %.
« Le gaspillage alimentaire est une tragédie mondiale. Des millions de personnes souffriront de la faim aujourd'hui, car de la nourriture est gaspillée dans le monde entier », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. « Il s'agit non seulement d'un problème de développement majeur, mais les conséquences de ce gaspillage inutile entraînent des coûts substantiels pour le climat et la nature. La bonne nouvelle est lorsque les pays font de cette question une priorité, il est possible d’inverser la perte et le gaspillage de nourriture de manière significative, de réduire les incidences climatiques, les pertes économiques et d’accélérer les progrès vers les objectifs mondiaux. »
Depuis 2021, l'infrastructure de données s'est renforcée grâce à davantage d'études sur le gaspillage alimentaire. À l'échelle mondiale, le nombre de points de données à l’échelle des ménages a presque doublé. Néanmoins, de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire ne disposent toujours pas de systèmes adéquats pour suivre les progrès réalisés en vue d'atteindre l'objectif de développement durable 12.3, qui consiste à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d'ici à 2030, en particulier dans les secteurs de la vente au détail et de la restauration.
Seuls quatre pays du G20 (Australie, États-Unis, Japon, Royaume-Uni) ainsi que l'Union européenne disposent d'estimations sur les déchets alimentaires permettant de suivre les progrès réalisés d'ici à 2030. L'Arabie saoudite et le Canada disposent d'estimations adéquates pour les ménages, celles du Brésil sont attendues pour la fin de l'année 2024. Dans ce contexte, le rapport sert de guide pratique aux pays pour mesurer et fournir régulièrement des comptes-rendus sur le gaspillage alimentaires.
Les données confirment que le gaspillage alimentaire n'est pas seulement un problème de « pays riches », puisque les niveaux de gaspillage alimentaire moyens observés des ménages des pays à revenus élevés, intermédiaires supérieurs et intermédiaires inférieurs diffèrent de seulement 7 kg par habitant. Dans le même temps, les pays les plus chauds semblent générer davantage de déchets alimentaires par habitant au sein des ménages, ce qui pourrait s'expliquer par une plus grande consommation d'aliments frais contenant une grande quantité de parties non comestibles ainsi que par l'absence d'une chaîne du froid solide.
Selon des données récentes, la perte et le gaspillage de nourriture ont généré 8 à 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), soit près de cinq fois celles du secteur de l'aviation ainsi qu’une importante perte de biodiversité due à l’occupation de l'équivalent de près d'un tiers des terres agricoles de la planète. Le coût des pertes et gaspillages alimentaires pour l'économie mondiale est estimé à environ 1 000 milliards de dollars.
Les zones urbaines devraient particulièrement bénéficier des efforts visant à renforcer la réduction des déchets alimentaires et la circularité. Les zones rurales génèrent généralement moins de gaspillage de nourriture, ce qui s'explique probablement par un usage plus important des restes alimentaires destinés aux animaux domestiques, au bétail et au compostage domestique.
En 2022, seuls 21 pays avaient inclus la réduction des pertes et/ou des déchets alimentaires dans leurs plans nationaux pour le climat (CDN). Le processus de révision des CDN pour 2025 offre une occasion unique de renforcer l'ambition climatique en intégrant les pertes et les déchets alimentaires. Le rapport souligne également l'urgence de s'attaquer au gaspillage alimentaire sur les plans individuel et systémique.
Des bases solides et des mesures régulières sont nécessaires pour des améliorations soient visibles au fil du temps dans les pays. Grâce à la mise en œuvre de politiques et de partenariats, des pays comme le Japon et le Royaume-Uni montrent qu'un changement à grande échelle est possible, avec des réductions de 31 % et 18 % respectivement.
« Compte tenu du coût considérable du gaspillage alimentaire pour l'environnement, la société et les économies mondiales, nous avons besoin de mesures mieux coordonnées à travers les continents et les chaînes d'approvisionnement. Nous soutenons le PNUE dans son appel à ce qu’un plus grand nombre de pays du G20 mesurent le gaspillage alimentaire et œuvrent en faveur de l'ODD 12.3 », a déclaré Harriet Lamb, PDG de WRAP. « Il est essentiel de garantir que les aliments nourrissent l’humanité et ne finissent pas dans les décharges. Les partenariats public-privé sont un outil clé qui donne des résultats aujourd'hui, mais un soutien renforcé est nécessaire : qu'ils soient philanthropiques, commerciaux ou gouvernementaux, les acteurs doivent se rallier à des programmes qui s'attaquent aux conséquences énormes du gaspillage alimentaire sur la sécurité alimentaire, notre climat et nos portefeuilles. »
Le PNUE continue de suivre les progrès réalisés à l’échelle nationale pour réduire de moitié les déchets alimentaires d'ici à 2030, en mettant de plus en plus l'accent sur des solutions allant au-delà des mesures de réduction. L'une de ces solutions est l'action systémique par le biais de partenariats public-privé (PPP) : Il s'agit d'amener le secteur public, le secteur privé et les organisations non gouvernementales à œuvrer ensemble, à identifier les goulets d'étranglement, à élaborer conjointement des solutions et à faire avancer les choses. Un financement approprié peut permettre aux PPP de réduire les déchets alimentaires de la ferme à la table, de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et le stress hydrique, tout en partageant les meilleures pratiques et en encourageant l'innovation en vue d'un changement global à long terme. Les PPP sur les pertes et les déchets alimentaires se développent dans le monde entier, notamment en Australie, en Indonésie, au Mexique, en Afrique du Sud et au Royaume-Uni, où ils ont permis de réduire de plus d'un quart les déchets alimentaires des ménages par habitant entre 2007 et 18.
NOTES POUR LES RÉDACTEURS
À propos du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE)
Le PNUE est la principale autorité mondiale en matière d'environnement. L’organisation joue un rôle de chef de file et encourage les partenariats en faveur de la protection de l'environnement en étant source d’inspiration, en informant et en permettant aux nations et aux peuples d'améliorer leur qualité de vie sans compromettre celle des générations futures.
À propos de WRAP
WRAP est une ONG mondiale basée au Royaume-Uni. Elle fait partie des cinq principales organisations caritatives britanniques dans le domaine de l'environnement et collabore avec les gouvernements, les entreprises et les particuliers pour veiller à ce que les ressources naturelles de la planète soient utilisées de manière durable. Fondé en 2000 au Royaume-Uni, WRAP œuvre aujourd'hui dans le monde entier et est un partenaire de l'alliance mondiale du prix Earthshot de la Fondation royale.